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[1/2] Disparitions forcées au Guatemala: Le cas CREOMPAZ

[1/2] Disparitions forcées au Guatemala: Le cas CREOMPAZ

Deux grandes affaires de disparitions forcées commises durant la guerre civile sont passées en jugement pendant la période d’engagement de Corsin au Guatemala, entre février 2016 et février 2017 ; il s’agit des cas CREOMPAZ et Molina Theissen, qui sont toujours en cours aujourd’hui. Il a ainsi eu l’occasion de se rendre au tribunal à plusieurs reprises au cours des procès, dans le cadre de son engagement de volontaire sur le terrain.

De retour en Suisse depuis deux mois, Corsin revient ici sur le cas CREOMPAZ, au cours duquel PBI accompagne un collectif d’avocats qui défend les familles des victimes et une association des victimes qui témoignent lors du procès.

Le cas CREOMPAZ

Le 6 janvier 2016, 14 anciens militaires de haut rang sont arrêtés pour disparitions forcées et crimes contre l’humanité. C’est la découverte d’une ancienne base militaire (aujourd’hui connue sous le nom CREOMPAZ) dans le département d’Alta Verapaz, qui a amené de nouvelles preuves et a permis l’interpellation des accusés. En effet, la Fondation d’anthropologie médico-légale du Guatemala (FAFG) a exhumé, entre 2012 et 2015, les restes de plus de 558 personnes récupérés dans une fosse commune. La majorité portait des marques de torture et d’esclavage. Jusqu’ici, la FAFG a pu identifier 128 des personnes exhumées, toutes ayant disparues entre 1981 et 1988.

Climat politique tendu

Les premières audiences concernant les ex-militaires impliqués dans ces crimes ont eu lieu depuis février 2016. Cela a amené un climat politique tendu pour diverses raisons : d’un côté, les arrestations ont eu lieu huit jours avant l’investiture du nouveau président Jimmy Morales. De l’autre, les personnes arrêtées sont ou ont des relations avec des individus influents dans la société guatémaltèque. Pour cette raison, les organisations civiles impliquées dans cette affaire craignent de fortes réactions. En effet, depuis le début des audiences, diverses attaques à l’encontre d’organisations accompagnées par PBI ont été enregistrées, telles que des campagnes de diffamation, des menaces d’intimidation et de la surveillance, ce qui les rend nerveuses. Un avocat m’a confié : « C’est le pire quand tout est calme et que rien ne se passe. Ça me rend nerveux, parce qu’on sait bien qu’il va y avoir des réactions, mais on ne sait pas quand ni sur qui ça va tomber. »

Être en sécurité grâce à l’accompagnement

L’accompagnement du collectif d’avocat par PBI au cours du procès est donc capital. Nous les avons escortés sur le trajet entre leur bureau et le tribunal, ainsi que lors des audiences. Outre ce collectif d’avocat, nous avons également accompagné les témoins entre leur hôtel, dont la localisation était secrète, et le tribunal afin qu’ils puissent y faire leurs dépositions. Pour PBI, ce fut des semaines éprouvantes, car tout cela a nécessité un important travail de coordination, de sorte que les autres tâches de PBI (telles que les autres accompagnements protecteurs, les réunions avec les autorités, etc.) puissent toujours être assurées.

La position des militaires

L’atmosphère était tendue au tribunal, due à la présence des familles des victimes, ainsi qu’à celle des militaires et des membres de la famille des inculpés. Ces derniers se sont par ailleurs rassemblés devant le tribunal, pour protester contre ce procès, tout en insultant et harcelant les avocats, les témoins et les volontaires PBI à l’aide de mégaphones.

L’explication des militaires concernant les restes humains retrouvés est aussi très différente de ce qui a été avancé par l’accusation : ce serait les victimes d’un tremblement de terre de 1976 ou bien, il s’agirait d’un ancien cimetière de la population locale. Néanmoins, la juge Claudette Dominguez a décidé en juin 2016 qu’il y avait suffisamment de preuves à l’encontre des huit ex-militaires pour les inculper pour disparitions forcées et crimes contre l’humanité. En raison du recours stratégique des militaires, le processus est cependant momentanément suspendu. De plus, neuf mandats d’arrêt ont été émis à l’encontre d’anciens militaires en lien avec ce cas. Parmi ceux-ci, l’ex-ministre de la défense du Guatemala et Edgar Ovalle Maldonado, adjoint au Parlement guatémaltèque, fondateur du parti du président et conseiller de celui-ci. Edgar Maldonado est d’ailleurs en fuite depuis que la Cour Suprême a levé son immunité en mars 2017.

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