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Colombie : Lisa Stalder raconte comment elle a vécu les 18 premiers mois qui ont suivi la signature des accords de paix.

Colombie : Lisa Stalder raconte comment elle a vécu les 18 premiers mois qui ont suivi la signature des accords de paix.

Lisa Stalder a passé 18 mois en Colombie en tant que volontaire de PBI. Cette période correspondait également aux 18 premiers mois qui ont suivi la signature des accords de paix entre l'État colombien et les Forces Armées Révolutionnaires de la Colombie (FARC). Elle nous raconte son expérience.

Je suis de retour en Suisse depuis deux semaines - et pourtant je ne me sens pas encore tout à fait de retour. Pendant mes premiers mois en Colombie, il n’a pas toujours été facile de m'habituer à un nouvel environnement et de comprendre les contextes politiques, économiques, culturels et sociaux. Mais le retour en Suisse est aussi un changement. Par exemple, la pression professionnelle en Suisse ou l'importance de la croissance économique à laquelle beaucoup de choses sont liées, me frappent. Le rythme de vie est différent ici. L'idée de ce qui constitue la prospérité, la qualité de vie et le développement aussi.

Un an et demi sur le terrain avec PBI, un an et demi d’accords de paix – le bilan

Mes 18 mois en tant que volontaire PBI à Urabá dans le Nord-Ouest de la Colombie ont coïncidé avec les 18 premiers mois qui ont suivi la signature de l'accord de paix entre l'État colombien et les FARC, l'ancien plus grand groupe de guérilla du pays. Ce fut une période turbulente pour les défenseuses et les défenseurs des droits humains (DDH) colombiens. En effet, le retrait des FARC des zones rurales ne signifiait malheureusement pas la fin de la violence et de la guerre pour les communautés et les activistes.

En 2017, l'année qui a suivi la signature des accords, 106 défenseuses et défenseurs des droits humains ont été tués en Colombie. C’est un chiffre très élevé par rapport aux années précédentes, mais il ne s’agit pas seulement d’un chiffre. En effet, entre la fin du mois de novembre et le début du mois de décembre, Mario Castaño et Hernán Bedoya, deux activistes qui étaient accompagnés indirectement par l'équipe de PBI à Urabá, ont été assassinés. Pour nous, les volontaires de PBI, cela a entraîné période très intense et stressante avec de nombreuses demandes d'accompagnement de DDH qui étaient très proches des victimes. Malgré la douleur et la peur, ils ne voulaient pas abandonner la résistance.

Durant cette période, je me suis souvent sentie impuissante face à l’ampleur de la violence et les intérêts qui se cachent derrière elle. J'avais également peur pour les DDH accompagné-e-s, avec qui on passe beaucoup de temps et qu’on apprend à connaître personnellement. Toutefois, pour les habitant-e-s d'Urabá, ce n'était pas la première fois qu'ils perdaient des membres de leur communauté et de leur famille ou des ami-e-s. Une défenseuse m'a expliqué que toutes ces pertes douloureuses sont aussi la raison pour laquelle elle ne renonce pas à se battre pour la justice - pour honorer les victimes.

Pendant cette période, j'ai également pris conscience de l'importance de l’accompagnement de PBI pour les communautés et les DDH. Il apporte un aspect de sécurité qui est parfois nécessaire afin que les activistes s'organisent et prennent des décisions dans des situations difficiles. Ce petit geste de solidarité internationale est une forme de reconnaissance du travail accompli par ces personnes qui résistent quotidiennement aux expulsions, à l'injustice et à la guerre.

Accords de paix en danger?

J'ai suivi de loin les élections présidentielles en Colombie. Le vainqueur, Iván Duque, candidat du parti conservateur Centro Democrático avait annoncé lors de sa campagne électorale vouloir modifier les accords de paix. Cela risque de mettre en péril le processus paix. Cela va également impliquer une grosse charge de travail pour les activistes locaux et les volontaires de PBI. Au niveau international, il est d'autant plus important de faire pression pour protéger les défenseuses et les défenseurs des droits humains. Après mon expérience sur le terrain, je vais continuer à m’engager dans cette direction.

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