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Honduras/Suisse : Témoignages de défenseurs menacés et attentes des Nations Unies

Honduras/Suisse : Témoignages de défenseurs menacés et attentes des Nations Unies

«J’ai peur de raconter ce qui m’arrive en tant que défenseuse et en tant que femme. Mon pays, celui-là même qui devrait nous protéger, c’est lui qui nous persécute et ne nous permet pas de dire quoi que ce soit.» Ces sérieuses constatations ont été émises par Irma Lemuz Amaya de l’OPDHA (Observatoire permanent des droits humains de l’Aguán) à propos du Honduras. Avec quatre autres défenseurs des droits humains honduriens, elle était à Genève du 4 au 11 juin à l’occasion de l’examen de son pays par le Comité des Nations Unies pour les Droits économiques, sociaux et culturels (DESC).

Depuis 2001, le Honduras n’avait pas été réexaminé par ce Comité et cette année, avec d’autres organisations partenaires, PBI en a profité pour co-organiser un événement le lundi 6 juin afin de discuter des mesures et mécanismes de protection destinés aux défenseuses et défenseurs des droits humains (DDH). La soirée a notamment bénéficié des témoignages de trois des défenseurs honduriens présents mais également de Michel Forst, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme, et de la Mission permanente de la Norvège qui est à la base de la nouvelle résolution de l’ONU pour la protection des défenseurs DESC.

Menace obscure et constante

PBI Honduras y a présenté son nouveau rapport sur la situation de la défense des DESC dans le pays. La réalisation effective de ces droits repose sur la société civile et, particulièrement, sur les épaules des DDH, notamment ceux qui luttent pour l’environnement ou le territoire. Pourtant, depuis le premier examen du Honduras par le Comité DESC en 2001, plus de 111 défenseurs ont été assassinés sans que le gouvernement ne fournisse de mesures de protection efficaces. La défenseuse Berta Cáceres, tuée en mars dernier, est au nombre des victimes. Durant la soirée du 6 juin, un membre de son organisation – le COPINH (Conseil civique des organisations populaires et autochtones du Honduras) – a également évoqué les menaces qui planent sur les défenseurs : «Nous sommes constamment entourés de voitures sans plaques, encore plus depuis la disparition de Berta, et il nous est impossible de deviner si celles-ci sont là pour nous protéger ou pour nous assassiner.»

Constats et réponses des Nations Unies

Pour le Rapporteur spécial Michel Forst, c’est du côté de la responsabilité des Etats mais aussi des entreprises étrangères, à qui les premiers font la part belle, très souvent au détriment de la population locale, qu’il faut agir. «Comment se fait-il que les Etats soient plus à l’écoute des entreprises que de leur propre société civile ?». Quatre jours auparavant, Michel Forst et deux de ses confrères – John Knox (Rapporteur spécial sur les droits humains et l’environnement) et Victoria Tauli Corpuz (Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones) – avaient appelé les gouvernements à protéger les défenseurs de l’environnement et du territoire. «Nous voulons souligner que les défenseurs environnementaux devraient être considérés comme des héros parce qu’ils se mettent eux-mêmes en danger pour protéger les droits et le bien être des autres. Au lieu de cela, ils sont souvent accusés d’être des ennemis de la nation.»

En mars 2016, le Conseil des droits de l’homme a adopté la résolution proposée par la Norvège en faveur de la protection des défenseurs DESC. Bien que contestée par certains pays membres de l’ONU, cette résolution constitue un premier pas nécessaire pour avancer vers une reconnaissance et une protection effective des DDH et que les gouvernements devront s’efforcer de mettre en pratique.