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La voix des territoires: Interview avec Milbia Andrea Díaz au Conseil des droits de l'homme

La voix des territoires: Interview avec Milbia Andrea Díaz au Conseil des droits de l'homme

En Colombie, les communautés rurales et autochtones mènent une lutte incessante pour la défense de leurs terres et de leurs droits face à des violations systémiques. Milbia Andrea Díaz, militante de longue date et membre de la Commission interecclésiale de justice et de paix, incarne cette résistance. Lors de son passage à Genève pour la 58e session du Conseil des droits de l'homme, elle a porté la voix de ces communautés devant la communauté internationale. Nous l'avons interviewée pour en savoir plus sur son engagement et ses attentes.

Du 2 au 6 mars, PBI Suisse a accompagné la défenseuse colombienne des droits humains Milbia Andrea Díaz lors de la 58e session du Conseil des droits de l'homme à Genève. Venue dans le cadre d'un speaking tour, Milbia est une membre active de la Commission interecclésiale de justice et de paix (J&P - Comisión Intereclesial de Justicia y Paz), une ONG qui soutient, accompagne et conseille les processus organisationnels dans les zones rurales et urbaines du pays. Dans le cadre de ce travail, ils documentent, rendent visibles et accompagnent toutes les initiatives qui visent la paix, la défense des territoires et de la vie. Milbia est agroécologiste de profession, mais défend les droits humains depuis près de 20 ans.

Milbia a représenté la Commission et ses défis lors d'une tournée de plaidoyer en Europe. Au Palais des Nations, elle a rencontré des missions permanentes telles que celles de Belgique, d'Irlande, d'Argentine et d'Allemagne. Elle a également visité le Centre de documentation, de recherche et d'information des peuples autochtones (DOCIP) et rencontré la Rapporteuse spéciale sur la situation des personnes défenseuses des droits humains, Mary Lawlor. Finalement, elle a participé à un événement public, co-organisé par PBI, en tant que panéliste invitée à l'Université de Genève.

À travers ses interventions, elle a porté un message clair : les communautés doivent être au centre de la construction de la paix et les États doivent garantir des conditions sécurisées pour les défenseurs·euses des droits humains. Pour en savoir plus sur son combat, ses attentes et les défis qui persistent, nous vous proposons ici un extrait de notre entretien. 

Quels résultats attendez-vous de la session du Conseil des droits de l'homme?

Milbia: Nous pensons vraiment qu'il est urgent que la communauté internationale fasse pression sur le gouvernement colombien pour qu'il réponde aux demandes des communautés. En d'autres termes, bien que les rapports aient fait état de certains progrès en termes de paix, il est également important de dire qu'il y a un nombre très élevé de violations des droits humains.

«La paix ne peut pas être imposée d’en haut; elle doit être construite par les communautés elles-mêmes» 

Je pense qu'il est du devoir des États d'appeler le gouvernement colombien à écouter les initiatives des communautés, à garantir aux leaders communautaires la possibilité de continuer à dénoncer, à continuer à rendre visible, à avoir un soutien politique, voire économique, car les fonds pour la paix se perdent dans la bureaucratie. Et il est important que ces ressources parviennent aux communautés qui sont réellement engagées dans des processus de construction de la paix afin de garantir leur vie au niveau territorial. La paix doit être un exercice mené par les communautés de base pour avoir un impact réel.

Quel type de soutien international vous semble vraiment nécessaire pour protéger les personnes défenseuses des droits humains?

Milbia: Que des fonds puissent également être alloués, à partir des fonds de la paix, à ces communautés, car ces fonds ne parviennent pas aux transformations territoriales. La paix est globale. Il ne s'agit pas seulement de désarmer les structures, mais aussi de répondre à tous ces besoins fondamentaux.

Quelles leçons d'autres pays peuvent-ils tirer des efforts de construction de la paix en Colombie?

Milbia: Je pense qu'en Colombie, il y a eu des progrès importants en matière de mémoire, c'est-à-dire de reconstruction de la mémoire, ce qui fait peut-être défaut dans d'autres pays.

Mais aussi dans le cadre de l'exigence de vérité, ne pas rester dans les cycles de haine et de vengeance, mais pouvoir reconstruire la mémoire à partir de ce qui a été douloureux, mais avec l'intention qu'il puisse y avoir de véritables processus de guérison, des progrès, et pouvoir continuer à construire le projet de vie communautaire que l'on souhaite, mais à partir de la recherche de la vérité et de la recherche de la justice.

De quelle réalisation professionnelle êtes-vous la plus fière?

Milbia: Défendre les droits humains est une tâche qui, en soi, procure une grande satisfaction, car c'est comme apporter une contribution importante à quelque chose qui semble très petit, mais qui est en réalité la concrétisation de la recherche de la paix. Donc, pouvoir savoir que vous avez apporté votre grain de sable à des communautés qui ont des propositions de dignité, je pense que c'est la réussite professionnelle, que ce sont des gens qui vous enseignent, qui vous font voir la réalité et qui vous placent dans une réalité du pays qu'ils ignorent souvent. Et je pense que contribuer à ce dialogue avec eux est plus un apprentissage que vous obtenez que ce que vous apportez tout d'un coup.

Réunion avec Mary Lawlor, la rapporteure spéciale des Nations Unies, à Genève

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